Neurones vs transistors : La guerre des intelligences a t elle déjà commencée?

Neurones vs transistors : La guerre des intelligences a t elle déjà commencée?

Note: La majorité des réflexions présentes dans cet article sont issues du livre de L. Alexandre paru en 2017,“La guerre des intelligences” .

Dans l’histoire de l’évolution Homo sapiens a naturellement tiré avantage de ses capacités cognitives. Son intelligence lui a permis de mieux s’adapter à son environnement et d’assurer sa reproduction au détriment des autres espèces.
L’intelligence pourrait se définir comme la capacité à traiter de l’information en vue d’atteindre un objectif. Or, si l’on peut réduire la à cette définition, homo-sapiens n’a souffert jusqu’à aujourd’hui d’aucune réelle concurrence. L’invention du transistor – qui reste à l’ordinateur ce que le neurone est à notre cerveau – a toutefois changée les choses.
Depuis les travaux de turing en 1945, depuis l’énonciation de la loi de Moore en 1965 et la commercialisation des premiers microprocesseurs quelques années plus tard nous avons réussi à construire, en moins d’un demi siècle, des machines dont les capacités de calcul dépassent désormais de loin ce que l’évolution biologique a créée au terme de millions d’années.
En quoi l’intelligence biologique d’homo-sapiens est elle aujourd’hui menacée? Pourquoi faut il s’en inquiéter et comment pouvons nous réagir?

# Définition de l’IA

Le développement de l’IA peut être décomposé en 4 phases:
1/ Algorithmes 100% programmés (1960 – 2010)
Facilement auditable, la puissance de calcul de la machine est destinée à réaliser des tâches simples.
2/ Machine learning (apprentissage automatique) et deep learning (depuis 2010)
Par l’analyse statistique d’un grand nombre de donnée, les algorithmes mettent en évidence des pattern.
Exemple une IA ayant analysé des milliard de photos de chat pourra, sur la base de ces analyses, identifier précisément ce qui sur une image caractérise un “chat”.
3/ IA Transversale (cumule les disciplines)
4/ IA Forte, consciente d’elle même.

# L’IA, un véritable enjeu de puissance publique (militaire, économique)

“Celui qui deviendra le leader dans ce domaine, qui qu’il soit, sera le maître du monde.”
V. Poutine, 2017.
Le rapport Villani remis au gouvernement en 2018, insiste sur la nécessité pour la france de se positionner sans tarder sur les problématiques liées à l’IA:
_ La France dispose d’excellents chercheurs en IA mais peine à transformer ses capacités en application indus et eco, de plus les carrière de chercheurs dans le publique sont peu attrayante (Ex: Yann Lecun chez FB)
_ 4 Secteurs prioritaires où la France doit particulièrement concentrer son effort de développement de l’intelligence artificielle : la santé, les transports, l’environnement et la défense.

L’IA est un formidable instrument décisionnel. Elle offre la capacité d’analyser plus de donnée qu’aucune intelligence biologique, aussi organisée soit elle, n’a jamais été en mesure de traiter.
Un exemple flagrant dans le secteur économique est BlackRock. L’entreprise a su se positionner très tôt et tire aujourd’hui pleinement profit des capacités d’analyse prédictives de l’IA en matière de gestion des risques.
L’entreprise doit son écrasante domination sur le marché de la finance à la puissance de son IA, Aladdin.
BlackRock enregistre toutes les datas possibles: mouvement boursier, données carte bancaire, déclaration d’un ministre, message sur les réseaux sociaux..
Aladdin réalise plusieurs centaines de millions de calculs toutes les semaines.

Exemple: Faut il accorder des prêts hypothécaire dans une région donnée? Aladdin constate que de nombreux prêt sont résiliés prématurément dans cette région. Dans la masse des données il découvre une constante, la région compte un nombre important de cadre d’une grande société informatique. Ces profils sont souvent mutés.
Résultat= Il est déconseillé d’accorder hâtivement des prêts dans cette région si ces derniers ne sont pas honorés jusqu’à leur terme car le montant des intérêts versés sera plus faible.
Solution= Augmenter les taux d’intérêt des prêts accordés aux abords des grandes sociétés informatiques.

Que les Etats après la crise de 2008, sollicitent BlackRock pour analyser les actifs de plusieurs banques en faillites montre deux choses:
1/ L’obsolescence de notre intelligence biologique face au monde numérique
En quelques années, les NTIC ont bouleversées structurellement tous les secteurs de notre économie. Le numérique a permis l’émergence de système si complexe qu’ils dépassent de loin l’entendement de nos cerveaux encore conçu il y a peu pour identifier nos prédateurs et distinguer les baies comestibles dans des forêts d’afrique centrale.
Force est de constater que le monde qui se crée sous nos yeux évolue plus vite que nous et chaque jour est un pas de plus vers notre propre obsolescence. Comment pourrions nous saisir et mesurer l’étendue des facteurs qui influence un marché à un instant T, cela nous est physiquement impossible.
2/ L’impuissance des Etats en matière d’IA
C’est le secteur privé qui construit l’IA. Favoriser l’industrie de la tech et permettre l’émergence de géant capables de développer des IA fortes est donc un enjeu politique majeur. La chine en est le parfait exemple.

# La course à l’IA

Quand les US créent une tech, les chinois la copie et les européens la régule.
Pendant que l’europe castre dans le berceau son industrie technique avec ses obligations réglementaires, les géants chinois et US vivent un “Reich numérique” et accumulent des montagnes de données.
→ GAFAMI vs BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi)

Pour être entraîné les IA ont besoin d’être nourrie par des datas. Les futurs maître de l’IA sont donc ce qui aujourd’hui peuvent collecter d’énormes quantités de données.

# Quelle rôle joue l’intelligence dans nos société

Les inégalités de QI sont la seule inégalité véritablement acceptée de tous car niée de tous (les tenants de la gauche pensent que la pauvreté n’a que des causes sociales, quand les tenants de la droite considèrent que le succès vient avec le travail et la volonté). En réalité, le QI et la réussite professionnelle / sociale sont étroitement corrélés, faisant des inégalités de QI la principale inégalité, source de toute les autres.

Les inégalités de QI sont majoritairement génétiques (de naissance) et globalement héréditaires même si le mode de vie (malbouffe, sous-stimulation…) accentue cet état de fait.
Après une période d’augmentation générale du QI (due à une meilleure hygiène de vie), l’effet Flynn s’est tari en occident, entraînant une baisse du QI moyen, car les personnes au meilleur QI font moins d’enfants et les personnes de faibles QI en font plus et les stimulent moins.
En Asie, l’effet Flynn bat son plein : le QI connaît une forte augmentation pour des raisons environnementales (fin de la malnutrition, éducation…).
L’Afrique devrait connaître à son tour une explosion du QI dans les prochaines décennies.
Mais au-delà du QI, le vrai enjeu va être le QCIA (quotient de compatibilité avec l’IA).

# Comment l’IA structure t elle l’économie

Aujourd’hui, nous n’en sommes qu’aux balbutiements (l’IA est encore faible, il n’existe pas encore d’IA « forte », consciente d’elle-même) mais les développements sont extrêmement rapides.

Les IA vont rapidement remplacer le travail intellectuel (avocat, médecin…) car la masse de données qu’elles possèdent est phénoménale (ex : des millions de clichés radiologiques, des milliards de datas de santé…) et cela permet de réaliser des corrélations impossibles à un humain. Chaque profession dont la compétence réside aujourd’hui dans le traitement pur de donnée ne peut rivaliser avec l’IA.

Le droit: Un avocat, met en perspective la jurisprudence et la loi, traite de l’information dans le seul but de répondre à une question. Au regard de ces données, quelles règles puis je invoquer pour défendre ou accuser?
La médecine: Un médecin collecte un ensemble de donnée (antécédents médicaux, constante biologique, ressenti du patient..), les traite et établis rationnellement un diagnostic sur la base de cette analyse. De plus ici la majorité des infos seront à l’avenir obtenu numériquement (capteur bio sensorielle etc..)
Les transports: Comme un conducteur automobile n’est qu’une interface entre l’extérieur et la voiture. Son cerveau analyse et traite un ensemble d’information qui lui permette de prendre des décisions. La voiture devant freine, je ralenti, la route tourne, je tourne le volant…

Aucune de ces tâches ne peut pas être réalisé par une IA. Dans ces trois domaines l’IA est même plus performante et de loin que le cerveau biologique, simplement parce qu’elle peut accéder à plus d’information, la traiter plus rapidement et ce en réalisant des économies d’échelle significatives.
Combien de temps faut il pour former un nouveau médecin, 30 ans? Combien de temps pour dupliquer une IA, quelques secondes?

Paradoxalement, les métiers manuels diversifiés seront les derniers remplacés car un robot multitâche coûte plus cher qu’un programme informatique (le radiologue sera remplacé avant l’aide-soignante).

La fin du travail est annoncée par beaucoup, mais cette peur méconnaît l’inventivité humaine : de nouveaux métiers vont apparaître autour de l’IA.
L’IA est à court terme une formidable opportunité (elle va résoudre de nombreux problèmes bien mieux que les humains, surtout dans la santé). Quelle changement entraîneront sa généralisation, comment l’IA évoluera t elle?

# Conséquences d’une économie dont la production est soutenue par l’IA

L’IA a libéré le peuple du travail abrutissant et asservissant, les gains de productivité et la croissance obtenues, permettent la distribution d’un revenue universel pour tous.
Le travail n’est plus réservé qu’à une élite qui participe seule à construire le monde de demain, les masses sont réduite à assurer la fonction consumériste nécessaire à l’économie capitaliste.
(Le revenu universel est en cela une idéologie fasciste, à l’opposé des discours égalitaire soutenue par la gauche).

# Quelle solutions?

1/ Développer l’intelligence biologique
Pour affronter l’IA, pour collaborer avec elle, pour la rendre plus compétitive.
Remettre en question l’enseignement vertical (par spécialité) au profit de la transversalité.
L’Éducation doit devenir une branche de la médecine, construite sur les progrès des sciences cognitives elle doit permettre de proposer à chacun un enseignement personnalisé afin d’exploiter au mieux son potentiel. “Il faut mettre des bac +8 dans les crèches et les écoles.”
Aujourd’hui nous sur-payons nos meilleurs cerveaux pour développer l’IA quand nous sous-payons nos instituteurs.
Or l’intelligence est en majorité génétique non empirique, 2 possibilités: l’eugénisme ou la neuro-augmentation.

2/ L’eugénisme
Faut il laisser encore au hasard le choix de notre évolution?
“Il sera en 2100 jugé aussi étrange de laisser de petit enfants naître avec un QI inférieur à 160 qu’aujourd’hui de mettre sciemment au monde un bébé porteur de trisomie ou déficient mental.”
“Il paraîtra aussi baroque d’avoir un enfant naturellement qu’aujourd’hui accoucher chez soi” (L. Alexandre cf La guerre des intelligences)

La sélection génétique et la procréation assisté deviendront la norme. Les humains mieux sélectionnés in-vitro seront plus intelligents et en meilleure santé (cf Bienvenue à Gattaca).
Cela pose évidemment de nombreux problèmes éthiques mais les réponses à ces problèmes seront différentes selon les pays, pouvons nous accepter que nos enfants soient défavorisés intellectuellement quand en chine la sélection génétique permet d’obtenir de haut QI.
Maîtriser la conception des enfants doit aussi nous interroger sur la capacité de survie de l’espèce humaine en tant que telle.
Cependant, cette évolution sera lente alors que l’IA évolue en permanence.

3/ L’hybridation
Cette solution prônée par Elon Musk (Neuralink) consiste à créer des implants cérébraux qui boosterons notre cerveau. Si l’idée est très enthousiasmante (maîtriser la connaissance sans effort ni délai), le vrai risque est la manipulation : qui produit les contenus ? seront-ils orientés ? quid du brain washing ? que se passe-t-il si nous sommes hackés ? Ces implants deviendraient-ils le cheval de Troie d’une véritable dictature de la pensée encore plus aboutie que 1984 ?
En effet, si on peut injecter des informations directement dans notre cerveau, il sera possible également de lire nos pensées. Que reste-t-il de nous si nous n’avons même plus de refuge de notre cerveau pour penser en toute liberté ? Quel usage un gouvernement pourrait-il faire de ces informations, qui ne soit pas totalitaire ?

4/ Projeter nos esprits dans des corps robotisés
La victoire ultime sur la mort. Sans corps, nous sommes immortels. Mais que restera-t-il de nous quand nous serons fusionnés avec l’IA et que la mortalité n’existera plus alors qu’elle est l’essence même de l’homme et vraisemblablement l’origine de son désir créatif?

# Conclusion

Le problème de toutes ces évolutions c’est qu’elles ont des effets bénéfiques individuels indéniables à court terme (moins de maladies, meilleur QI…), mais à la fois vont créer des inégalités temporaires (seuls les riches pourront au début s’offrir cela) et impliquent des changements pour l’humanité toute entière.

Dès lors que les effets bénéfiques sont importants, il sera impossible d’enrayer le développement des IA dans tous les aspects de nos vies. En effet, quel parent pourrait refuser de faire soigner son enfant par une IA plutôt qu’un médecin, si ses chances de survie sont décuplées ? Quel homme politique pourrait assumer de faire prendre à son pays un retard si énorme en terme de santé publique ?
Mais si les humains sont connectés à des implants, l’IA sera certainement dedans. Serons-nous encore des humains ? Comment ne pas être asservis par l’IA si celle-ci est déjà dans nos cerveaux ?

Au final, l’IA se développera sans maîtrise, car personne ne pense ni ne parle pour l’humanité.

Le débat politique se cristallisera sur l’opposition transhumanisme / bioconservateur.
Dans tous les cas, la bataille sera gagnée par les tenants de l’hybridation (transhumanistes) car ceux qui s’hybrident (et ils le feront même si la réglementation le leur interdit) deviendront super-intelligents et deviendront donc de-facto leaders. Ceux qui refusent l’hybridation seront à la traîne.
Face à une IA galopante et à l’hybridation, le rôle de l’école va changer. Notre valeur sera dans ce qui fait notre humanité puisque la connaissance sera injectable à la demande sans effort. Il faudra former davantage à l’esprit critique, la réflexion, la créativité.

 

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